Surprise : il y a 15 jours, ma lettre intitulée « la maladie de Lyme, cette mal-a-dit de l’âme » m’a valu une avalanche de courriels criant au scandale, m’accusant de tous les maux et m’abreuvant d’injures. Vindicatifs et parfois haineux, certains messages poussaient l’animosité jusqu’à me souhaiter de contracter la maladie et d’en souffrir beaucoup. Pourquoi une telle déferlante de réactions négatives? En fait, son origine provient de Facebook. Je ne sais pas très bien comment (moins geek que moi, tu meurs), mais il semblerait que les malades de Lyme et leurs associations soient alertés dès que le sujet de la borréliose est abordé sur les médias sociaux. Résultat : j’ai touché d’un coup un imposant nouveau public qui n’est nullement familiarisé avec l’approche informative de Néosanté. Après vérification, il s’est confirmé qu’aucun de mes détracteurs n’était abonné au mensuel ni à la newsletter hebdomadaire.
Si j’avais su que cette lettre allait se répandre comme une traînée de poudre, je l’aurais certainement rédigée autrement. Après coup, je conçois bien que l’article ait pu heurter des tas de personnes souffrantes qui se sont déclarées « choquées », « révoltées », voire « écoeurées » par mes propos. C’est pourquoi, aujourd’hui, je vais m’adresser spécialement à elles. Non pas pour présenter des excuses – je ne m’excuse jamais d’être de que je suis ni de penser ce que je pense – ni pour me dédire – je ne retire pas un mot de que j’ai écrit il y a deux semaines – , mais pour apporter quelques nuances et dissiper plusieurs malentendus. En effet, certains passages de mes articles sur la maladie de Lyme ont été mal interprétés et/ou mal compris par ces nouveaux lecteurs inattendus. J’espère que les trois précisions qui suivent leur permettront de mieux appréhender notre démarche et leur donneront envie d’en savoir plus sur notre vision de la santé.
1er malentendu : vous n’êtes pas des malades imaginaires
C’est la principale des méprises que j’ai relevées dans vos commentaires courroucés : vous avez assimilé « psychosomatique » et « psychologique » ! À juste titre, de nombreux patients atteints de borréliose éprouvent du ressentiment envers les médecins qui, ne parvenant pas à établir un diagnostic correct, leur ont suggéré d’aller voir un psy, comme si leur maladie était « seulement dans la tête ». Et ils m’ont mis dans le même sac que ces toubibs à la noix. Or, la psychosomatique n’est pas à confondre avec la psychologie ou la psychiatrie : les secondes envisagent la sphère mentale isolément, la première étudie son influence sur l’ensemble du corps. C’est une branche de la médecine qui globalise l’individu et examine comment le cerveau et le système nerveux agissent à distance sur les organes et les fonctions. Ce n’est pas une discipline réservée aux malades imaginaires, que du contraire ! Malheureusement, c’est aussi une voie de recherche laissée en friche pour des raisons « pasteuriennes ». Exemple : depuis qu’elle a découvert l’implication de la bactérie Helicobacter pilori dans l’ulcère de l’estomac, la science ne considère plus le stress comme le principal facteur causal de cette pathologie gastrique. C’est à notre avis un tort, car nous pensons que les microbes importent beaucoup moins que le terrain où ils évoluent. Nous le pensons aussi pour la maladie de Lyme : sans nier que la bactérie Borrélia joue un rôle dans l’apparition des symptômes, nous sommes d’avis qu’une blessure de l’âme – autrement dit un choc psycho-émotionnel – précède toujours l’infection. « Risible », nous ont rétorqué certains « Facebookeurs », « parce que même des enfants et des animaux attrapent cette saloperie ». C’est alors à mon tour d’être choqué : depuis quand les enfants sont-ils dépourvus d’émotions ? Et depuis quand le bipède humain est-il le seul être vivant doté d’un cerveau ? Chez tout porteur de neurones, la psyché a un impact potentiel sur le « soma ». La somatisation se produit parfois par la seule magie de l’imagination, mais même dans ce cas-là, elle n’a rien de purement imaginaire. Chers malades de Lyme, vous avez bien raison de revendiquer la réalité physique de votre maladie !
2ème malentendu : vous n’êtes coupables de rien
Deuxième quiproquo : en lisant que « le microbe n’est rien, le terrain est tout », certains en ont déduit que je fustigeais leur mauvaise hygiène de vie. Plusieurs patients démontés m’ont assuré qu’ils vivaient de manière très saine, qu’ils veillaient particulièrement à leur alimentation, qu’ils ne prenaient jamais de médicaments et qu’ils étaient en excellente santé avant d’être piqués par la tique fatidique et de développer la borréliose. Je veux bien les croire et je n’ai jamais prétendu le contraire ! Certes, je pense qu’un « terrain fort », et notamment une bonne immunité procurée par une flore intestinale optimale, participe d’une bonne prévention contre toutes les formes d’infection. En parlant du chien de mon ami naturopathe, j’ai d’ailleurs formulé l’hypothèse qu’un régime à dominante crudivore serait un outil prophylactique non négligeable. De son côté, la spécialiste de la maladie de Lyme avec laquelle j’ai ébauché un dialogue m’a révélé que la bactérie Borrélia prospère plus volontiers dans un milieu acidifié. Il n’est donc pas sot d’imaginer que la tique « choisisse » ses victimes selon qu’elles manifestent certains paramètres bioélectroniques, à commencer par un déséquilibre acido-basique. Mais loin de moi l’illusion qu’une vie de saint garantirait un terrain sain et éloignerait l’acarien ! Pas plus tard que ce week-end, un ami me racontait qu’il n’était jamais piqué par les moustiques. Fumeur invétéré et travailleur sédentaire, grand amateur de bière et de bonne chère, il constitue pourtant l’antithèse parfaite d’un mode de vie équilibré. Si vous lisiez régulièrement Néosanté, vous sauriez que nous sommes précisément le seul journal de santé naturelle à minimiser le rôle des habitudes de vie dans la genèse des maladies. Elles comptent sans doute, mais beaucoup moins que le vécu psycho-émotionnel, les déchirures relationnelles et les conflits existentiels. Pour la nouvelle médecine psychosomatique, toutes les maladies infectieuses transmises par la peau trouvent une partie de leur explication dans des problématiques de séparation, lesquelles fragilisent l’épiderme et attirent les bestioles suceuses de sang. Dans la maladie de Lyme, le contexte déclenchant serait le ressenti d’être parasité ou, à l’inverse, celui d’être traité comme un parasite. C’est pourquoi l’épidémie actuelle ne serait pas sans rapport avec la crise économique et le phénomène d’exclusion sociale. Vous voyez donc bien que le terrain, dans le sens étroit où on l’entend habituellement, est à nos yeux d’une importance mineure. Et qu’il n’est pas du tout question de vous culpabiliser pour telle ou telle infraction à une quelconque « vie saine ». Chers malades de Lyme, vous n’êtes coupables de rien du tout !
3ème malentendu : vous n’êtes pas des poltrons
Pour conclure ce triptyque, la troisième méprise qui m’a valu tant d’hostilité concerne la phobie des tiques. Le sang contaminé de nombreux malades n’a fait qu’un tour lorsqu’ils ont lu que j’étais prêt à botter le cul de ma fille cadette hésitant à marcher jambes nues dans les hautes herbes. J’ai visiblement fait figure de père maltraitant imposant sa folle imprudence à une adolescente bien plus sage et réfléchie que moi. Je les rassure d’abord d’emblée : je suis tout le contraire d’un tyran domestique et je n’impose mes opinions à personne de ma famille. C’est généralement avec humour et toujours sans violence que j’essaie de transmettre mes idées écolo. Ensuite, je tiens à préciser que je ne me moque jamais des personnes apeurées, mais bien de leurs peurs, ce qui est très différent. Un individu ne se résume pas à ses attitudes et ses comportements. Et ceux-ci sont souvent l’héritage d’une éducation, voire d’un bourrage de crâne. Enfin, et le malentendu provient de là, je ne me gausse que des frayeurs que je juge irrationnelles. Mais lesquelles le sont ? Lesquelles protègent utilement du danger et lesquelles n’ont pas cette fonction salutaire ? C’est tout l’enjeu du débat. Pour les malades de Lyme, il semble acquis que les tiques et les bactéries sont des ennemies à fuir ou à combattre puisqu’elles sont la cause de leurs tourments. Normal : c’est ce que la médecine officielle rabâche, et même de nombreuses thérapies non conventionnelles. Pour la nouvelle médecine psychosomatique, celle qui est au cœur de notre projet éditorial, il n’y a aucune raison de craindre plus petit que soi, et encore moins le microcosme microbien. Dans cette vision de la nature, les tiques ne sont pas des assaillantes mal intentionnées, mais des sortes de seringues vivantes chargées d’inoculer du génome secourable. Dans cette vision de la nature, la sympathique smala des Borrélia n’est pas une armée adverse mais un corps d’auxiliaires mobilisés aux fins de finaliser une guérison dont l’érythème et la phase chaude signalent le processus. Dans cette vision de la nature, l’immunité n’est pas un arsenal guerrier mais un système douanier organisant l’immigration d’informations. Dans cette vision de la nature, rien n’est hasard, rien n’est fatalité, tout a un sens biologique. C’est une façon radicalement neuve de concevoir la vie en général, et la maladie en particulier. Celle-ci n’étant pas l’oeuvre de vecteurs prédateurs, elle ne devrait jamais faire peur ! Pour les lecteurs habituels de Néosanté (de notre revue mensuelle, de notre lettre hebdomadaire ou des livres que nous éditons), il va assez facilement de soi d’échapper aux psychoses infectieuses contemporaines. Chez beaucoup d’entre eux, le saut de paradigme a déjà eu lieu. Mais pour les visiteurs occasionnels de notre page Facebook, je peux très bien comprendre que notre discours anxiolytique sur les tiques et les germes ait résonné comme une provocation et soit passé pour un déni de la réalité. Sachez dès lors, chers malades de Lyme, que je n’avais jamais eu l’intention de vous faire affront en insinuant que vous êtres des froussards et des couards bêtement effrayés par des petites bêtes. Vous êtes plutôt, à mes yeux, les victimes de la doctrine médicale dominante et de ses dogmes pasteuriens. Nuance !
Conclusion provisoire
Après avoir, je l’espère, dissipé ces quelques malentendus, je ne vais pas en rester là. Dans de prochaines infolettres, je compte me défendre de vos accusations d’être mal informé et de « raconter n’importe quoi sur un sujet que je connais pas ». Certes, je ne suis ni médecin ni infectiologue, mais vous non plus ! Et tout malades que vous êtes, ça ne vous donne pas le droit de prétendre détenir la vérité sur la borréliose de Lyme. Dans notre revue mensuelle, le Dr Jean-Claude Fajeau va également se pencher sur la question et nous proposer prochainement son décodage psychobiologique de cette affection. D’ici quelques mois, le Dr Van den Bogaert va également nous apporter son éclairage biomédical. Enfin, je caresse l’ambition de mettre au point un « plan de lutte » alternatif contre la maladie de Lyme. À l’inverse des stratégies couramment préconisées, celui-ci serait résolument probiotique à l’égard des bactéries et totalement pacifique envers les tiques. Il ne ferait appel à aucune thérapie palliative et prendrait le contrepied de la méfiance ambiante en conseillant les promenades insouciantes en forêt. Car en marge des nombreuses critiques, mon article du 29 juillet m’a aussi permis de récolter des témoignages intéressants : mêmes mordues des dizaines de fois, certaines personnes n’ont jamais souffert de rien ! Pour conclure provisoirement, je vais vous partager une citation. Elle émane du Pr Christian Perronne, chef du département des maladies infectieuses à l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches (France) et président de la commission « maladies transmissibles » du Haut Conseil de la santé publique (HCSP). Grand spécialiste de la maladie de Lyme, cet éminent scientifique est souvent cité en référence par les associations de patients militants. Puissent ces derniers méditer la portée de propos recueillis en 2012 par le site Ouvertures : « Nous sommes tous porteurs de « petites bestioles » potentiellement infectieuses sans pour autant être malades. Il n´y a pas selon moi matière à paniquer. Une grande partie de la population est, ou a été, en contact avec des borrélies de différentes souches, sans forcément déclencher des symptômes. C´est là toute la complexité de cette infection, qui peut aussi être confondue avec d´autres agents infectieux, très nombreux. Le corps humain héberge des tas de bactéries et il est bien difficile de déterminer celles qui sont réellement en cause. »
Yves Rasir
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