GARDASIL : éléments pour un vrai débat

Supposé prévenir les cancers liés à certains papillomavirus (HPV), le vaccin Gardasil est désormais au centre d’une controverse médiatique assez confuse dont la caractérisation la moins contestable est qu’elle conforte chaque partie dans ses présupposés : alors que, comme on va le voir, le problème n° 1 avec ce vaccin tient au contournement d’un développement clinique rationnel qui a permis une commercialisation précipitée, le camp des antis recrute les plus farouches opposants à la méthodologie classique dudit développement (notamment les essais randomisés en double aveugle), ce qui permet en retour aux pros de se draper dans les exigences présumées de l’évaluation « scientifique » pour ridiculiser la contestation de leurs adversaires [1]. La stratégie consistant à recruter les ennemis de ses ennemis a quand même des limites…


Dans le présent article à visée simplement didactique, on se propose de clarifier les problèmes technico-réglementaires de l’espèce, en soulignant d’emblée qu’ils n’ont rien de spécifique à Gardasil, mais qu’ils relèvent plutôt de ce qu’un éminent collègue a dénoncé comme relevant d’une « criminalité organisée » [2] propre tout autant à la médecine [3] qu’à la pharmacie.

Table des matières

1. Principes technico-réglementaires en pharmacie industrielle
2. Développement
o Efficacité
o Tolérance
3. Autorisation de mise sur le marché
4. Après commercialisation
o Prix et remboursement
o Pharmacovigilance
o Publicité
5. Le dernier communiqué d’Infovac
6. Conclusion

Principes technico-réglementaires en pharmacie industrielle

Au contraire de ce qu’imaginent encore trop de gens – à commencer par les présumés « experts » mandatés par l’autorité politique pour pondre de pseudo-rapports sur les médicaments [4] –, l’invention, la fabrication et la commercialisation des médicaments sont normalement régies par des normes fort strictes, qu’on récapitule ordinairement sous le vocable « technico-réglementaires » pour exprimer qu’en pareille espèce, la législation et la réglementation sont directement inspirées par les principes technico-scientifiques de la recherche pharmacologique et clinique : elle imposera par exemple la mise en œuvre d’analyses chimiques, de tests in vitro [5], d’études chez l’animal ou d’essais cliniques, dont les modalités seront ensuite précisées par un certain nombre de recommandations techniques fort pointilleuses [6].
On ne comprend jamais mieux les scandales pharmaceutiques qu’en les replongeant dans le contexte de cette réglementation, une fois qu’on l’a organisée selon l’axe chronologique naturel dans la vie d’un médicament.
• Le développement clinique, c’est-à-dire l’ensemble des essais et tests opérés dans les trois directions suivantes :
o pharmacologie : les propriétés « théoriques » du nouveau médicament, telles qu’elles ressortent, par exemple, d’expérimentations opérées dans des tubes à essai ou sur des cellules en culture ;
o toxicologie : évaluation chez les animaux d’une toxicité potentielle, à court ou à long terme ;
o clinique : vérification chez l’homme de la portée réelle des propriétés pharmacologiques, recherche de la posologie efficace, quantification des bénéfices, évaluation des effets indésirables.
• L’autorisation de mise sur la marché, c’est-à-dire l’acceptation par les autorités des « preuves » tirées du développement clinique, incluant la définition des indications admises, des posologies recommandées et des contre-indications.
• L’après-commercialisation (qu’il serait plus approprié d’appeler « après autorisation »), qui tourne essentiellement autour des trois points suivants :
o la fixation du prix et, le cas échéant, l’acceptation au remboursement (selon un taux qui peut varier) ;
o la pharmacovigilance, à savoir le suivi des effets secondaires du médicament [7] ;
o le contrôle de la publicité telle qu’assurée par le fabricant pour promouvoir son nouveau médicament.
Il importe de bien comprendre qu’à chacune des étapes qui viennent d’être énumérées, les administrations sanitaires disposent d’un droit de contrôle et, plus encore, de sanction… L’intérêt de se concentrer sur le respect du processus technico-réglementaire, c’est que par opposition aux évaluations « expertales » plus ou moins convaincantes (toxicité « négligeable/ inacceptable », amélioration du service médical rendu « majeure/ inexistante », etc.) compte tenu des biais connus qui pèsent sur le monde des experts, personne n’est censé ignorer la loi ce qui permet de faire l’économie des opinions personnelles et de leurs biais éventuels [8].
Examinons donc le dossier Gardasil au crible du schéma naturel et facilement justifiable qui vient d’être rappelé : sans le moindre esprit d’exhaustivité, on se limitera à un modeste échantillonnage assez édifiant pour démontrer la duplicité des autorités qui ont permis ce scandale, ainsi que la légèreté des professionnels qui s’appliquent à le conforter.

Développement

Efficacité
En principe – et pour autant que les médecins promoteurs de cette vaccination sachent de quoi ils parlent –, l’examen de cette phase ne devrait pas prendre beaucoup de temps : pour fondamentale qu’elle soit dans la vie d’un médicament (la plus fondamentale, en vérité), elle a été purement et simplement contournée grâce à la procédure du fast-track accordée, en 2002, par l’administration américaine (FDA) au fabricant (MSD). Pour remettre les choses en perspective, rappelons que la faveur d’une telle procédure accélérée a également été accordée aux vaccins anti-H1N1, avec les résultats que l’on sait (ajoutés à ceux que l’on ne sait pas…) [9].
Dit autrement, cela signifie que les contraintes authentiquement expérimentales qui ont fini par s’imposer pour l’évaluation des nouveaux médicaments (en l’espèce : le choix de critères réalistes lors des essais, fussent-ils en double aveugle) ont été épargnées au fabricant [10]. En conséquence de quoi, et jusqu’à preuve du contraire (qui échoit aux promoteurs de cette vaccination) :
• on ne sait pas quelle proportion de filles vaccinées sont durablement protégées contre les virus censément visés par Gardasil (HPV 16 et HPV18) ;
• on sait encore moins quelle proportion de filles vaccinées sont protégées contre les lésions précancéreuses attribuées, à tort ou à raison, aux virus HPV (attendu qu’il est parfaitement possible que même SI elles étaient durablement protégées contre les HPV 16 et 18, les vaccinées soient contaminées par d’autres souches aussi cancérigènes, par une sorte de déplacement écologique dont on connaît bien d’autres exemples en infectiologie) [11] ;
• on ignore totalement la proportion de filles vaccinées qui échapperont effectivement à un vrai cancer : si les autorités ont tenu à épargner au fabricant les affres de l’attente concernant la prévention des simples lésions précancéreuses, on imagine mal qu’elles aient la cruauté de leur imposer sur un bien plus long terme l’évaluation des cancers dûment constitués [12].
On relèvera à ce dernier sujet que pour raisonnable qu’elle puisse paraître dans l’absolu, l’impossibilité d’exiger d’un fabricant des évaluations à très long terme est toute relative : compte tenu de la rentabilité indécente de ce vaccin, il eût été parfaitement envisageable d’imposer à son fabricant une étude après commercialisation, mais méthodologiquement bétonnée, évidemment [13]. On en est loin : MSD n’a même pas eu à cœur [14] de fournir aux autorités les évaluations rétrospectives qui, en principe, avaient conditionné la faveur d’une procédure accélérée (à savoir le suivi per protocole des sujets inclus – soit, tout simplement, l’évaluation la plus naturelle au terme de l’essai clinique le plus banal : les protocoles d’études, c’est pas fait pour les chiens).
Évident pour n’importe quel professionnel tant soit peu compétent – pour autant qu’il soit de bonne foi [15] – le scandale d’un tel passe-droit s’inscrit dans un contexte de laisser-faire dont on trouve bien d’autres indicateurs dans le dossier de la FDA. J’ai déjà eu l’occasion de rapporter celui-ci, sidérant même pour un observateur assez au fait des turpitudes pharmaceutiques : lors de l’analyse d’un essai, il apparaît qu’une jeune fille incluse était déjà contaminée par le HPV 18 avant sa vaccination ; en conséquence de quoi, elle est naturellement exclue de l’analyse d’efficacité du vaccin sur le HPV 18 ; mais elle est maintenue dans celle qui concerne le HPV 16. Et comme le critère final – dit « composite » – concerne l’efficacité du vaccin contre le HPV 16 OU le HPV 18, elle reste incluse dans l’analyse au titre des sujets vaccinés avec succès [16]. Ainsi et pour récapituler : une jeune fille vaccinée après sa contamination par le HPV 18 se voit dûment comptabilisée au titre de l’efficacité de Gardasil contre les HPV 16 ou 18… Le tenancier de la pire gargote chinoise est un Paul Bocuse par rapport au statisticien responsable d’une telle cuisine ; quant aux autorités qui l’ont avalée, ce ne sont pas elles qui seront malades, malheureusement…
Parmi les autres bidouillages statistiques apparemment avalisés sans mot dire par les autorités américaines, on relèvera la pratique à tout le moins problématique du pooling, c’est-à-dire du regroupement d’études distinctes en vue d’augmenter la puissance statistique. Un tel regroupement, en effet, annihile les effets de la randomisation et du double aveugle qui conditionnent, pourtant, la validité des comparaisons traitement actif/placebo : lorsque deux essais distincts ont permis d’inclure d’une part mille femmes sous Gardasil comparables à 1000 femmes sous placebo et d’autre part 500 femmes sous Gardasil comparables à 500 femmes sous placebo, le regroupement de ces deux essais permet certes d’atteindre l’effectif de 1 500 femmes sous Gardasil, mais dont plus rien ne garantit qu’elles sont bien comparables aux 1 500 femmes sous placebo [17].
Tolérance
On l’a opportunément oublié [18], mais la méthodologie de l’essai randomisé en double aveugle contre placebo est également un moment crucial pour évaluer la sécurité d’un produit : n’en déplaise à ceux qui soutiennent le contraire sans s’être jamais noirci les mains à aller contrôler les données-sources (en l’espèce : les dossiers médicaux originaux), je n’ai encore jamais vu – en plus de trente ans de pharmacovigilance intensive – une toxicité médicamenteuse significative qu’on ne puisse, au minimum, suspecter lors d’un développement clinique bien conduit (et correctement analysé).
Or, il n’est que de se reporter au dossier Gardasil de la FDA pour s’apercevoir qu’avec la tolérance comme avec l’efficacité, tout a été fait pour dissimuler le potentiellement significatif derrière le manifestement indifférent. C’est ainsi qu’on voit pompeusement comparer, entre produit actif et placebo, la fréquence de survenue « d’événements indésirables » aussi clairement pertinents que… des crises d’appendicite [19]. En revanche, on cherche la moindre explication au fait que dans la population incluse, a priori jeune et en bonne santé, on ait davantage de décès sous Gardasil que sous placebo, sachant de plus qu’on s’est arrangé pour noyer le poisson en regroupant ceux des décès chronologiquement très proches de l’injection (et à ce titre hautement suspects d’être en rapport avec la vaccination) et ceux de survenue plus tardive (qui peuvent effectivement être liés à un événement intercurrent tel qu’un accident de la circulation) [20]. On remarque également que la curiosité de l’analyste est limitée par la restriction de ne se concentrer que sur les effets indésirables survenus chez plus de 2% des sujets inclus [21] : or, sur un effectif inclus d’environ 6 000 patients, un seuil de 2% laisse dans l’ombre des effets indésirables survenus chez 120 patients, et susceptibles, à l’échelle de notre seul pays, de concerner ensuite des centaines de milliers de victimes pour une vaccination dont les promoteurs ne cachent pas qu’elle devrait concerner toutes les jeunes filles et femmes [22].
J’arrête là pour ce qui concerne l’évaluation des effets indésirables au cours du développement, mais en indiquant au fabricant et aux administrations concernées que, pour leur être agréable et par seul souci du Bien Public, je me tiens à leur disposition pour reprendre l’intégralité de l’analyse sur la base des données-sources : à la différence de leurs experts, j’ai une grosse habitude du job [23]…

Autorisation de mise sur le marché

À ma connaissance, il n’existe pas de réglementation stipulant précisément les conditions à remplir pour échapper à la réglementation… Mais en matière pharmaceutique, on n’aura pas l’impression d’exagérer en imaginant un minimum de deux prérequis :
• une urgence de santé publique, à savoir : i/une maladie grave, ii/ sans autre option thérapeutique que le médicament proposé à l’enregistrement accéléré ;
• un minimum de crédibilité scientifique et éthique attachée au fabricant qui fait l’objet d’un passe-droit aussi considérable.
Or, il est patent que, comme pathologie, le cancer du col de l’utérus est loin de correspondre à une urgence de santé publique. Pour s’en tenir à un critère « dur » [24], la mortalité n’a cessé de décroître au cours des années, ce progrès étant généralement rapporté à un meilleur dépistage. Les derniers chiffres de la Haute Autorité de Santé (HAS) font état, en 2011, de 998 décès pour la France et il est admis que celle-ci concerne essentiellement des femmes d’un milieu socio-économique défavorisé, qui passent justement au travers des mailles du dépistage. Pour remettre, là encore, les choses en perspective :
• chez les moins de 65 ans, la mortalité par cancer du col ne dépasse pas le double de la mortalité par noyade, et est encore moindre rapportée aux années de vie perdues, attendu que cette seconde cause de mortalité touche nombre de très jeunes enfants ;
• la mortalité totale par cancer du col est sept fois moindre que la mortalité féminine liée au cancer du poumon, et onze fois moindre que la mortalité féminine par accidents – toutes causes de décès essentiellement évitables où l’on pourrait penser qu’un modeste investissement financier, sans commune mesure avec le gouffre Gardasil (cf. plus bas), permettrait d’améliorer la situation en des termes numériques également sans commune mesure avec les bénéfices présumés de la vaccination contre HPV ;
• comme rappelé plus haut, on n’a aucune estimation du nombre de cancers (a fortiori : du nombre de décès) évités par Gardasil, et encore moins d’estimation comparée par rapport à l’option d’un simple dépistage ;
• comme avec d’autres infections faisant l’objet d’une médiatisation indistincte en vue d’une vaccination massive, voire « universelle » (ça ne vous rappelle rien ?), les principaux facteurs de risque reconnus pour un cancer du col incluent essentiellement des comportements individuels : nombre de partenaires sexuels, tabagisme, utilisation prolongée d’une contraception hormonale orale, co-infection avec d’autres maladies sexuellement transmissibles (chlamydia, herpès). On attend avec intérêt une évaluation du risque cancéreux chez les filles qui n’adoptent pas ces comportements – qui les associent encore moins – et qui sont néanmoins visées par les campagnes (parfois : par les obligations) vaccinales échafaudées par les autorités avec le concours d’experts émargeant chez les fabricants…
Quant à la crédibilité de l’heureux bénéficiaire d’un tel passe-droit, on se contentera de rappeler – à bon entendeur, salut ! – que MSD, le fabricant de Gardasil, a également été le papa de Vioxx, ce qui renvoie à une histoire plutôt sordide où pas mal d’irrégularités, certaines fort graves [25], ont été finalement mises en évidence [26]. L’obstination de MSD à ne pas fournir, même a posteriori, les analyses censées conditionner la faveur d’un fast track est un indicateur additionnel – et non des moindres – concernant la crédibilité médico-scientifique ou éthique du fabricant [27] [28].

Après-commercialisation

Prix et remboursement
Le coût actuel d’une injection de Gardasil se situe aux alentours de 130 €, soit près de 400 € pour une primo-immunisation qui recommande 3 injections ; à quoi s’ajoute, évidemment, le coût de chaque visite imposée par une telle immunisation (au bas mot 70 € pour chaque immunisation complète – en supposant, on aurait vu pire, que les médecins vaccinateurs ne facturent pas en sus la consultation pour venir chercher l’ordonnance prescrivant Gardasil). Dans la perspective actuelle consistant à vacciner toutes les filles – et en supposant que, comme elles le font aussi couramment qu’indûment dans d’autres indications (la rougeole, par exemple), les autorités n’inventent pas de nouveaux rappels –, il faudrait donc compter au bas mot 200 millions d’euros par an pour assurer la couverture vaccinale des filles naissant dans notre pays (budget auquel il convient d’ajouter celui lié aux complications et à leur prise en charge, qui peut aller d’une simple consultation à une hospitalisation, éventuellement suivie de soins chroniques). En dépit du fait, on le répète, qu’il n’existe à l’heure actuelle aucune preuve de l’efficacité de Gardasil dans la prévention de la mortalité liée au cancer du col de l’utérus (et qu’un blanc-seing a été donné au fabricant pour se libérer du poids de la preuve à cet égard), les autorités françaises ont accepté le principe d’un remboursement : ce, sans jamais se demander si l’amélioration du dépistage ne permettrait pas de meilleurs résultats à bien moins cher [29].
Il convient donc de remettre ce budget annuel minimum de 200 millions d’euros pour rien de démontré et sur un objectif qui n’est en rien une priorité de santé publique (cf. plus haut), dans le contexte de restrictions qui, d’après les derniers chiffres, conduisent aujourd’hui le tiers des Français (Le Figaro, 15/10/13) à se priver de soins aussi essentiels, eux, que des lunettes ou des consultations dentaires. Outre une évaluation pharmaco-économique sérieuse concernant le rapport coût/bénéfice comparé des prises en charge relatives à la prévention des HPV 16 et 18 d’une part, au suivi ophtalmologique ou stomatologique d’autre part, on attend également une réflexion politique tant soit peu démocratique sur l’impératif que les risques de comportements individuels soient couverts par la solidarité nationale, au détriment d’autres risques nettement moins soumis au libre-arbitre, tels que ceux liés au vieillissement [30].
Pharmacovigilance
De nouveau à la louche et sans autre objectif que de cadrer grossièrement les évaluations requises par l’espèce, admettons qu’une vaccination généralisée par Gardasil permette de prévenir 20% des décès imputables aux cancers du col [31]. À l’échelle de la France, on verrait donc environ 200 décès épargnés chaque année. On peut admettre qu’un risque grave admissible ne devrait pas dépasser, quantitativement, 1% du bénéfice attendu [32], de telle sorte que l’on pourrait exiger que Gardasil ne cause pas plus de 2 décès chaque année en France. À raison de 400 000 nouvelles jeunes filles chaque année en France et de trois injections pour assurer la protection, on peut considérer que (quel que soit l’âge de la vaccination et l’espacement des injections), la préservation annuelle de 200 vies requiert, chaque année, 1,2 millions d’injections [33]. Ainsi, l’objectif d’un rapport bénéfice/risque acceptable impose donc que 1,2 millions d’injections ne causent pas plus que deux décès. La conclusion va de soi, sauf pour les super-Dupont de la recherche clinique : je ne connais pas une seule méthode de pharmacovigilance qui permette de repérer des phénomènes à la fréquence infime de 2/1 200 000. J’ai noté plus haut qu’au cours du développement, les autorités n’ont jugé ni utile, ni possible d’analyser les complications survenant à une fréquence de 2% ou moins : elles ont donc jeté l’éponge pour des niveaux de fréquence pourtant quelque 10 000 fois supérieurs à ceux qui seraient requis pour garantir une pharmacovigilance épidémiologiquement significative [34]…
Cet abîme statistique est justement au cœur de la principale objection que l’on peut adresser aux stratégies préventives qui conditionnent pourtant la rentabilité de plus en plus insolente des lobbies pharmaceutiques. À partir du moment où, dans une stratégie curative concernant des gens déjà malades, on vise un bénéfice chez une majorité d’entre eux, la fréquence des complications tolérables relativement à un tel bénéfice est également nettement plus élevée et à la portée d’études relativement peu discriminantes : si, par rapport à une maladie systématiquement mortelle, on vise une survie de 80% avec un nouveau médicament (soit 80 personnes sur 100 effectivement sauvées), un taux de complication grave de 1% (et même de 10%) serait tout à fait acceptable : or, pour détecter une complication survenant chez 1% des patients traités, on a juste besoin d’inclure 300 patients (et seulement 30 si on admet comme tolérable une fréquence de 10%). À l’inverse, dans une stratégie préventive qui vise des gens en parfaite santé dont une proportion infime fera une forme grave de la maladie, la possibilité de détecter une complication proportionnée à ce bénéfice statistiquement minuscule s’effondre très en deçà des méthodes disponibles : ainsi, par rapport à l’hépatite B qui, quoi qu’on en ait dit, ne causait pas plus que quelques centaines de formes graves chaque année, un nombre acceptable de complications iatrogènes graves n’aurait pas dû dépasser de beaucoup une petite dizaine ; mais dans une stratégie de vaccination « universelle » où l’on a vacciné 25 millions de personnes en quelques mois, aucune méthode au monde ne permet de repérer des complications dans un pourcentage aussi infime [35]. Ainsi, alors que les méthodes de pharmacovigilance étaient déjà assez grossières [36] à l’époque où l’on s’appliquait à repérer des fréquences de complications relativement élevées, puisque adaptées à un bénéfice attendu réel et potentiellement massif, elles sont tout simplement hors circuit depuis que l’enjeu est de détecter des fréquences quasi infinitésimales, pourtant seules acceptables relativement un bénéfice au mieux minime à l’échelle individuelle.
Les promoteurs de Gardasil ont donc beau jeu de balayer toute alerte de sécurité au motif que les méthodes ne sont pas fiables, que la notification est biaisée, etc. [37]. En spécialiste éprouvé de la pharmacovigilance, je confirme qu’ils n’ont pas entièrement tort. Mais la faille de leur raisonnement n’en ressort que mieux. Alors que la justification classique du fast track est qu’on ne va quand même pas priver les gens des bénéfices inconcevables liés à tel ou tel nouveau médicament, et qu’il sera toujours temps d’évaluer « en conditions réelles » les effets indésirables une fois cette merveille commercialisée : i/ de quels bénéfices peut-il s’agir puisqu’on n’a pas pris la peine de les objectiver proprement [38] ? ii/ comment faire pour évaluer la tolérance puisque aucune méthode n’est recevable aux yeux des fabricants – et surtout pas la notification spontanée qui, quoi qu’on en veuille et faute de mieux, reste LA première façon de surveiller un médicament une fois sur le marché ? Il en résulte que la procédure du fast track n’est qu’un blanc-seing pour autoriser la commercialisation de médicaments qui n’ont été proprement évalués ni du point de vue de l’efficacité, ni de celui de la tolérance. Pandemrix avait déjà été un bon exemple ; Gardasil en est un autre [39]…
Je termine la présente section par une remarque qui, elle aussi, dépasse le cas Gardasil. Pour des raisons que mes fidèles lecteurs ont vues souvent abordées sur mon site, il s’avère qu’en matière de vaccination, les autorités sanitaires ont complaisamment accepté de contribuer aux bénéfices des fabricants en se substituant à leurs équipes de visiteurs médicaux et en assurant par elles-mêmes une promotion qui, si elle était le fait des industriels, tomberait immanquablement sous le coup des sanctions visant la publicité abusive et même mensongère. Or et comme il est facilement vérifiable, l’essentiel des études concernant la pharmacovigilance des vaccins est conçu et contrôlé par ces mêmes autorités. Il y a là, manifestement, matière à un grave conflit d’intérêts qui, pour une fois, dépasse la seule question des gros sous : à l’évidence – et les exemples foisonnent – les autorités n’ont rien à gagner, bien au contraire, à organiser des études susceptibles de documenter les inconvénients parfois graves des politiques qu’elles ont-elles-mêmes définies. Mais cherchez donc, dans la littérature, des études de pharmacovigilance authentiquement indépendantes tant des autorités sanitaires que des investigateurs émargeant chez les fabricants…
Publicité
Un seul exemple suffirait pour caractériser l’esprit de tromperie qui a constamment sous-tendu la promotion de Gardasil. Tout le monde a entendu, comme moi, que Gardasil était le premier vaccin permettant de prévenir un cancer ; le seul problème, c’est que le même argument exactement avait été utilisé dix ans auparavant pour promouvoir la vaccination contre l’hépatite B. Même les super-Dupont de la recherche clinique qui ne savent ni compter, ni réfléchir, seront obligés d’admettre qu’il y a forcément un problème avec deux « premiers » à dix ans d’intervalle : l’ineptie de l’argument joint à la complaisance des autorités de contrôle dit assez le niveau intellectuel assez lamentable où se situe la promotion de Gardasil (on en verra un autre exemple dans un instant, avec le dernier communiqué d’Infovac).
Sans entrer, là encore, dans un détail disproportionné, on renverra le lecteur aux documents publicitaires disponibles afin de constater sur pièces que, pour l’essentiel, la promotion de Gardasil s’attache à dissimuler, voire à nier, les données pourtant très facilement vérifiables qui ont été exposées dans le présent article.
On relèvera notamment que, parfois maladroitement exacerbée par certains opposants, l’actuelle crispation des parties sur les questions de pharmacovigilance permet de passer par pertes et profits LA défaillance pourtant hénaurme du dossier concernant les problèmes d’efficacité : c’est une chose de chipoter – comme toujours – sur la portée d’une notification spontanée notoirement insuffisante, cela n’enlève rien au fait central que cela n’a de toute façon aucun sens d’ergoter sur les risques d’un médicament dont les bénéfices réels n’ont jamais été démontrés.
Cette question évidemment centrale des bénéfices permet également de constater que la promotion de Gardasil repose sur un déplacement parfaitement pervers : même en admettant (ce qui reste à démontrer) que la vaccination permette un certain degré de réduction des lésions pré-cancéreuses liés au HPV, la sensibilisation médiatique des foules ne s’est pas faite sur ces lésions (souvent silencieuses), encore moins sur des processus physiopathologiques qui sont loin de faire l’unanimité chez les spécialistes, mais sur l’événement-cible parfaitement effrayant du CANCER, et même du décès par cancer [40]. D’où il résulte nécessairement que dans l’attente d’une preuve directe et sérieuse concernant une réduction de cette mortalité cancéreuse, la promotion de Gardasil aura été parfaitement mensongère. Le reste n’est que détail – toutes proportions gardées.
Parmi ces détails qui ornementent, parfois en le dissimulant, le mensonge originel autour de ce vaccin, on relèvera le refus de publier les résultats négatifs : il en va ainsi avec la seule estimation actuellement disponible de l’éventuelle réduction des lésions précancéreuses, qui s’avère dérisoire (16,9% : cf. dossier américain, p. 17) et n’atteint même pas la significativité statistique.
Quant aux autorités – normalement supposées veiller à la conformité et à l’intégrité de la promotion assurée par le fabricant – c’est peu dire qu’elles ne donnent pas l’exemple. Pourtant émanant de la plus éminente instance française en matière de communication sur les médicaments, la simple bibliographie collectée par la HAS dans sa brochure de 2013 est un concentré de tout ce que l’on croyait interdit sur la base des recommandations officielles classiques, assorti d’une énorme beigne à l’endroit des principes les plus élémentaires de l’evidence-based medicine : aucune source primaire, références dispensées du préalable naguère incontournable de la publication dans une revue « de bonne qualité » à comité de lecture, absence de toute hiérarchisation critique [41], silence radio sur les critères de recherche documentaire comme sur les liens d’intérêts des auteurs – excusez du peu.

Le dernier communiqué d’Infovac (juin 2014)

Pour sortir des considérations platoniciennes qui précèdent et revenir au combat de façon plus pratique, concentrons-nous pour finir sur le dernier communiqué de presse d’Infovac, non daté précisément, mais postérieur à un colloque qui a regroupé des opposants à la vaccination en date du 24/06/14. Ce communiqué, signé par « 17 sociétés savantes et associations sanitaires », est organisé autour de cinq affirmations que nous allons rapidement réfuter une à une.
À titre liminaire, on relèvera qu’en contradiction avec la loi, aucun des signataires représentant les 17 associations en question n’a éprouvé le moindre besoin de mentionner, ne serait-ce que fugitivement, ses liens d’intérêts : on rappelle que l’esprit de l’art. L.4113-13 du Code de la santé publique n’est pas de s’affranchir d’une obligation fondamentale de transparence via une déclaration faite une fois pour toute et garée on ne sait où, mais d’informer loyalement ses lecteurs, à chaque fois, quant aux liens qui, à tort ou à raison, sont susceptibles d’être interprétés par un tiers comme une limite à l’impartialité. La question s’étant déjà posée pour un certain nombre des signataires, on interprétera leur obstination dans l’opacité comme un indicateur convaincant de l’impunité absolue qui règne toujours en France sur ce sujet pourtant crucial.
J’en arrive maintenant à l’argumentation du communiqué. Comme la plupart des documents issus d’Infovac, elle est débile.
1. « Il existe des données consistantes qui attestent de l’efficacité et de la sécurité du vaccin HPV ». Dommage que la HAS soi-même se contente d’évoquer un simple « présupposé » à ce sujet de l’efficacité. Dommage également que, sans doute inspirés par le précédent de Bachelot, les auteurs prétendent s’abriter derrière « la rigueur imposée aux produits de santé » en occultant que, dans son principe même, la procédure du fast track consiste justement à s’affranchir de cette rigueur : on ne peut quand même pas gagner sur les deux tableaux – accélérer (« fast ») le retour sur investissement tout en lavant plus blanc que blanc en matière de « rigueur » scientifique [42]…
2. « Les accusations (…) vont à l’encontre des avis favorables des autorités nationales et internationales ». Les accusations contre la vaccination H1N1 allaient également « à l’encontre » des avis favorables des mêmes autorités, auxquels s’étaient d’ailleurs joints certains des plus éminents signataires de la pétition…
3. « La désinformation induit une perte de chances définitive pour un nombre croissant de jeunes filles françaises ». À supposer que la critique de Gardasil soit une désinformation, on voit mal en quoi un statu quo pourrait nuire à des femmes en « nombre croissant » pour une pathologie dont la fréquence ne cesse de décroître [43]. En tout état de cause, la « perte de chances » sera plus aisément quantifiable le jour où l’effet préventif du vaccin Gardasil relativement au cancer du col sera plus qu’un « présupposé »…
4. « Le dénigrement du vaccin HPV porte gravement atteinte à la valeur de l’ensemble de la vaccination dans l’esprit de la vaccination ». L’atteinte sera nettement moins « grave » le jour où d’aussi éminents représentants de la crème médicale accepteront de voir avec « rigueur » dans LES vaccins des médicaments parmi d’autres et qu’ils cesseront de radoter comme des vieux cons intégristes sur le sacrilège consistant à ne pas croire sans preuve en « LA » Vaccination. Le dénigrement antivaccinal se calmera aussi lorsque, pour boucler ses fins de mois, l’industrie pharmaceutique cessera d’inventer des « vaccins » contre tout et n’importe quoi, de générer des drames comme la narcolepsie chez des gens jusqu’alors en parfaite santé et de ruiner les finances publiques par une voracité qui défie la « common decency ».
5. « La prévention des cancers évitables nécessite un engagement ferme de tous et sur tous les fronts ». Une nouvelle réquisition, par exemple ?…
Surtout, ne me dites pas « merci » d’avoir consacré du temps dominical à réfuter point par point un torche-cul aussi exécrable : c’était vraiment pas difficile…
Conclusion
Avec l’autorité objective que me confère l’âge associé au précédent d’avoir été (n’en déplaise aux super-Dupont) le premier à suspecter l’escroquerie de la « pandémie » porcine et à en décortiquer, ensuite, les principaux déterminants (incluant les décès inexpliqués au cours du développement), je le dis solennellement :
• aux jeunes parents : ne laissez pas menacer la santé de vos enfants par un vaccin dont l’évaluation a été aussi lamentable ;
• aux jeunes femmes : préservez votre précieux corps de ce produit multidéfectueux, et fermez vos oreilles à une propagande graveleuse dont les scandaleux excès auraient déjà dû être sanctionnés depuis longtemps.

Mathématicien de formation, le Dr Marc Girard est devenu médecin tout en menant des recherches sur la modélisation mathématique en biologie. Après un bref passage comme salarié d’une grande firme pharmaceutique, il a développé, en France, la première activité libérale de conseil en pharmacovigilance et en pharmaco-épidémiologie, tout en pratiquant comme psychothérapeute d’inspiration freudienne. A côté de ses travaux consacrés à la médecine et au médicament, il a publié les livres « Alertes grippales » (Éditions Dangles), « Médicaments dangereux : à qui la faute ? » (Éditions Dangles), et « La brutalisation du corps féminin dans la médecine moderne »

[1] J’ai également eu déjà l’occasion d’ironiser sur les confrères qui, prescrivant à tour de bras des vaccins ne valant pas mieux, se refont une virginité en dénonçant ce vaccin-là – et lui seulement. Même remarque pour ces parlementaires soucieux de s’auréoler d’une originalité sans risque dans un univers marqué par l’impératif du statu quo, qui s’autorisent d’une compétence passée en biologie ou en médecine pour prendre parti sur cette affaire où ils n’ont aucune compétence, tout en s’asseyant lourdement sur les questions pourtant très graves qui relèvent, au contraire et indubitablement, de leurs responsabilités politiques : l’indisponibilité organisée des vaccins obligatoires, par exemple, avec ses conséquences dramatiques en termes de droit comme de santé publique.
[2] P. C. Gøtzsche, Deadly Medicines and Organised Crime : How Big Pharma Has Corrupted Healthcare, Radcliffe Publishing Ltd, 2013.
[3] Quitte à renforcer un réseau d’amis déjà bien dense, j’insiste une fois encore sur le fait que ce qu’il est de plus en plus courant de désigner comme la criminalité pharmaceutique requiert nécessairement, pour prospérer, la complicité des médecins – que ceux-ci s’occupent de prescription ou d’évaluation.
[4] Et abstraction faite des revues « qui-ne-se-trompent-jamais ».
[5] Opérés dans des tubes à essai ou l’équivalent, par opposition aux études in vivo mises en œuvre chez des individus – animaux ou humains – entiers.
[6] Notamment celles édictées dans le cadre de l’International Conference for Harmonisation (ICH), qui – par souci d’économie et d’efficacité – vise à harmoniser les exigences réglementaires aux USA, au Japon et en Europe.
[7] Incluant normalement, outre les effets indésirables, les éventuels effets bénéfiques restés inaperçus durant la phase de développement.
[8] C’est d’ailleurs ce parti-pris strictement réglementaire, que j’avais d’emblée adopté dans mes missions judiciaires visant les médicaments, qui rend compte de l’animosité sans précédent qui s’est emparée des fabricants (privés du pouvoir de m’opposer la contre-expertise de leurs experts à la botte, fussent-ils prestigieux) et, plus encore,… des juges (par fonction supposés sanctionner les manquements à la loi et privés, par ma faute, du joker des expertises et contre-expertises à n’en plus finir pour noyer le poisson et prolonger jusqu’à l’intolérable des instructions pour rien).
[9] On relèvera que, exactement comme avec Gardasil, les promoteurs de la vaccination contre le H1N1 – jusqu’à leurs représentants les plus autorisés, incluant le ministre de la santé – n’ont jamais hésité à mentir effrontément en assurant au public qu’elle présentait exactement les mêmes garanties d’évaluation que les autres médicaments, alors qu’il suffisait d’en lire la notice pour s’apercevoir que ce n’était pas le cas.
[10] Au passage, on se permettra de remarquer que, parmi les opposants à cette vaccination, les antivaccinalistes qui passent leur temps à reprocher aux fabricants de transformer les gens en « cobayes » feraient mieux de réfléchir à leur rhétorique : pour autant que le terme « cobaye » soit associé à l’idée d’expérience clinique (autant que possible contrôlée par la réglementation en vigueur), ce qu’on pourrait reprocher à MSD, ce serait plutôt de n’avoir pas assez traité les gens en cobayes… Même dans la critique tous azimuts, il est toujours bon de réfléchir à la cohérence de ses métaphores.
[11] En fait, c’est déjà un euphémisme charitable de dire que « on ne sait pas » : comme l’ont bien montré Riva et Spinosa, la seule fois où cette question a été à peu près sérieusement évaluée, les résultats ont été statistiquement non significatifs.
[12] À supposer qu’une réduction des lésions précancéreuses ait été démontrée – ce qui, insistons-y, n’est même pas le cas – on retomberait sur une autre escroquerie classique en cancérologie et que l’affaire des mammographies a commencé de révéler au public : à savoir qu’il s’en faut de beaucoup qu’un pré-cancer soit un cancer et qu’il appelle forcément une prise en charge lourde et coûteuse… En d’autres termes, même s’il est statistiquement démontré que telle ou telle prise en charge réduit effectivement les pré-cancers, cela ne se traduit pas forcément par une réduction des cancers et de la mortalité associée (c’est parfois même le contraire qui se passe, comme on le voit avec ces lésions mammaires minuscules qui flambent après biopsie, alors qu’elles auraient peut-être spontanément régressé si on les avait laissées tranquilles dans leur coin).
[13] Par exemple : pas du cas/témoin laissé à l’invention des brigands rémunérés par le fabricant, encore moins des études « observationnelles » vantées pour leur « pragmatisme » par tous les cons qui ne comprennent rien à rien.
[14] Question d’anatomie pour le prochain concours d’internat : Le cœur des fabricants
[15] Halte à la surenchère des exigences !…
[16] Cf. dossier américain, p. 5.
[17] Comme illustré par l’exemple suivant : si le premier essai est réalisé chez des Pygmées, et le second chez des joueuses de la NBA, les Pygmées sous Gardasil qui se retrouvent dans le regroupement ne seront jamais comparables aux joueuses de la NBA sous placebo qui se retrouvent dans le même regroupement.
[18] Sous le prétexte, notamment, des effectifs inclus dans les essais supposés « trop faibles » pour permettre de discriminer les effets indésirables.
[19] Cf. dossier américain, p. 23.
[20] Cf. dossier américain, p. 21.
[21] Cf. dossier américain, p. 22.
[22] Petit signe en passant aux super-Dupont de la recherche clinique – incluant certains parlementaires, ainsi que des « philosophes-journalistes » – qui ont prétendu me confondre quand j’ai usé d’un argument similaire avec la vaccination anti-H1N1, en soutenant qu’avec de tels cadrages simplement destinés à fixer les idées sur la prise de risque, j’avais prophétisé un drame de santé publique qui ne s’est heureusement pas produit : ils ont gagné le droit d’apprendre à lire, accessoirement – mais est-ce trop demander ? – à réfléchir…
[23] C’est bien d’ailleurs parce que les « experts » maison sont parfaitement incapables d’opérer une telle analyse que j’ai été si souvent missionné par des firmes pour la faire à leur place.
[24] C’est-à-dire moins manipulable que « le risque » tel qu’opportunément défini par des commissions d’experts dont les émoluments sont proportionnés à la progression des ventes…
[25] Curfman GD et coll. Expression of concern : Bombardier et al., « Comparison of upper gastrointestinal toxicity of rofecoxib and naproxen in patients with rheumatoid arthritis, » N Engl J Med 2000 ;343:1520-8. N Engl J Med. 2005 ;353:2813-4.
[26] J’ai rappelé ailleurs qu’une situation assez comparable s’est présentée avec Viagra, médicament dont le souci numéro 1 était bien d’ordre toxique, et dont l’AMM a été accordée à un fabricant qui était loin, à ce moment, d’offrir des garanties satisfaisantes en matière de pharmacovigilance.
[27] La crédibilité éthique du fabricant de Vioxx se reconstitue également d’avoir obtenu un prix faramineux pour un anti-inflammatoire ciblé sur une population à risque significatif de faire des hémorragies graves, et de s’être ensuite appliqué à dépasser larga manu les limites fort étroites de cette cible une fois obtenu ce prix exceptionnel. La crédibilité des autorités sanitaires se reconstitue, en parallèle, de leur complaisance à l’endroit d’un tel dépassement d’indication (M. Girard. Innovation, quand tu nous tient…, Le Moniteur des pharmacies, 15/02/02 : 49).
[28] L’intérêt de viser le Vrai sans souci des modes, c’est d’être assez souvent en phase, voire en avance, sur l’actualité. Depuis la rédaction du présent article, on a appris que la filiale italienne de MSD avait été jusqu’à menacer un honorable universitaire d’une plainte judiciaire avec demande de dommages et intérêts à hauteur de… 1,3 millions d’euros – le crime de l’intéressé ayant été d’oser critiquer une nouvelle super-innovation thérapeutique (ezetimibe) du fabricant. Il a quand même fallu la médiatisation de cette histoire scandaleuse pour que la maison-mère se décide à désavouer sa filiale, ce qui n’est pas non plus l’indicateur d’une grande réactivité éthique…
[29] Je ne parle pas de ces couillons bienheureux qui ne craignent pas de proclamer – au Parlement ou ailleurs – que le meilleur moyen pour résoudre le dilemme, c’est encore de cumuler les deux procédures… ainsi que leur coût : tant qu’un tel gaspillage n’est pas financé par un prélèvement sur leurs indemnités d’élus…
[30] A fortiori si la couverture des risques du premier type, jamais sérieusement démontrée, n’est qu’un prétexte pour détourner l’argent public vers les fonds de pension qui gèrent désormais l’industrie pharmaceutique.
[31] C’est un espoir déjà optimiste par rapport à la seule estimation réaliste d’efficacité que l’on puisse tirer du dossier présenté à la FDA. De toute façon, mon raisonnement ne serait pas fondamentalement changé dans l’hypothèse bien plus généreuse que la vaccination éviterait tous les décès.
[32] Le raisonnement ne serait pas fondamentalement changé si l’on acceptait 10%.
[33] Et bien davantage actuellement où les autorités recommandent un « rattrapage » (ça ne vous rappelle rien non plus ?).
[34] Pour espérer détecter avec une probabilité de 95% une complication survenant à une fréquence de 1/100 000 (soit plus de dix fois supérieure à celle qu’il faudrait pour garantir la sécurité de Gardasil), il faudrait déjà regrouper quelque 300 000 sujets (Drug Information Journal 1985 ; 19 : 13-16) : on est loin des regroupements de la FDA permettant de cumuler péniblement l’expérience chez un maximum de 10 000 sujets.
[35] Sachant que l’acceptabilité du risque iatrogène ne doit pas se discuter en proportion du nombre (éventuellement énorme) de personnes vaccinées, mais relativement au nombre de complications effectivement évitées, lequel est généralement très faible avec la plupart des maladies actuellement visées par les nouvelles vaccinations.
[36] M. Girard. Post-marketing surveillance : an art or a science ? Drug Inf J 1986 ;20:347-349.
[37] Au passage, mention spéciale pour la crapulerie parfaitement imbécile de la HAS qui ne craint pas, une fois encore, de nous resservir l’argument atrocement recuit du « nombre de cas observés » comparé au « nombre de cas attendus », sans la moindre considération pour la sous-notification, dont on sait qu’elle atteint des sommets en matière de vaccination. Sans un mot de justification, non plus, à l’endroit d’un processus décisionnel ahurissant, qui légitime le retrait de Myolastan sur la base de deux notifications tout autant que le maintien coûte que coûte de médicaments qui ont, eux, motivé des milliers, voire des dizaines de milliers de notifications.
[38] Comme l’avoue avec une ingénuité désarmante la HAS dans sa brochure de 2013 : « l’effet préventif concernant (…) le cancer du col de l’utérus est présupposé ». À 400 € l’immunisation, ça fait cher du présupposé…
[39] N’est-ce pas, mutatis mutandis, le même type retour en arrière que celui déjà décrit à propos des génériques, dont la promotion a permis, en un temps record, l’effondrement des principes les plus intangibles de la fabrication pharmaceutique ? Comme tragiquement illustré par l’espèce, le « fast-track », c’est l’effondrement des principes les plus sacrés de l’évaluation pharmaceutique.
[40] « Le premier vaccin protégeant contre un cancer », vous dis-je. Quel aurait été le succès de cette promotion si les gens avaient suffisamment entendu ce que la HAS reconnaît désormais du bout des lèvres, à savoir que ce merveilleux effet anti-cancéreux est juste « présupposé » ?
[41] Notre bonne Académie de médecine (dont probablement 95% des membres ignorent tout de la méthodologie et seraient sans doute incapables de définir précisément une méta-analyse) y côtoie sans complexe la fondation Cochrane…
[42] J’achève cet article le jour même où en contradiction voyante avec les engagements de son patron, Michel Sapin soutient désormais que la finance serait « l’amie du gouvernement » (Le Figaro, 06/07/14). Sur un thème proche, il faudra bientôt comprendre que l’exigence de retour sur investissement et de rentabilité à court terme est « l’amie » de la Science – en tout cas des « société scientifiques » signataires du communiqué d’Infovac.
[43] Ce n’est pas la première fois que je remarque que beaucoup de médecins sont fâchés avec les chiffres : la scientificité herculéenne de leur formation a dû atrophier leur sens arithmétique…

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