Dépression rime (aussi) avec mystification

Vous pensiez avoir déjà tout vu en matière d’arnaque médico-pharmaceutique ? Détrompez-vous ! La bombe a éclaté au cœur de l’été : selon une analyse publiée en juillet  (1) par des chercheurs anglais dans la revue Molecular Psychiatry, rien ne prouve encore aujourd’hui, malgré des décennies d’études,  qu’un déséquilibre de la sérotonine soit responsable de la dépression !  C’est pourtant en se basant sur cette « théorie chimique » qu’ont été développés les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS), une classe de médicaments qui compose la majorité des antidépresseurs prescrits de nos jours. Or Joanne Moncrieff, professeur de psychiatrie à l’University College London et ses collègues ont eu beau éplucher l’ensemble de la littérature scientifique sur le sujet, ils n’ont trouvé aucune preuve convaincante que la maladie dépressive soit causée par des anomalies de la sérotonine, même pas des niveaux inférieurs ou une sécrétion réduite de ce neuromédiateur cérébral.
 
La sérotonine pas impliquée
 
Primo, les recherches qui ont comparé les taux de sérotonine et ses produits de dégradation dans le sang ou les liquides cérébraux n’ont pas montré de différence entre les personnes ayant reçu un diagnostic de dépression et les participants en bonne santé. Secundo, les grandes études qui ont examiné le gène transporteur de la sérotonine n’ont pas trouvé non plus de différences génétiques entre les personnes dépressives et les témoins sains. Et tertio –  devinez quoi ? – , la recherche médicale a en revanche bien établi la relation entre les stress existentiels et le risque de dépression : plus une personne avait vécu d’événements stressants, plus elle était susceptible d’être déprimée. Non seulement l’analyse londonienne expédie par le fond l’explication chimique de la dépression, mais elle met en lumière son origine psycho-émotionnelle ! En conclusion de leur étude explosive, les auteurs énoncent que « rien ne vient étayer l’hypothèse selon laquelle la dépression est causée par une baisse de l’activité ou des concentrations de sérotonine ».
 
 
Une théorie lucrative
 
Mais alors, comment expliquer la popularité du Prozac et des autres molécules inhibitrices ? Puisqu’il n’existe pas de mécanisme pharmacologique reconnu par lequel cette catégorie d’antidépresseurs agirait sur les symptômes dépressifs, d’où vient le succès des ISRS dont d’autres travaux ont montré qu’ils ne faisaient pas plus d’effet qu’un placebo? (2)  Sans avoir l’air d’y toucher, les chercheurs anglais observent que l’avènement de la théorie chimique a coïncidé avec une augmentation spectaculaire des traitements pharmaceutiques de la dépression. Et ils notent que 85 à 90% du public croient aujourd’hui au rôle de la sérotonine. De là à suggérer que la supercherie scientifique a été habilement montée pour créer un marché et ancrer une croyance, il y a un pas qu’ils ne sont pas loin de franchir. Last but not least, les auteurs ont découvert que les consommateurs de ces produits avaient des niveaux plus faibles de sérotonine dans le sang, ce qui pourrait impliquer  que l’augmentation générée à court terme par les médicaments serait suivie d’une baisse compensatoire dans le cerveau ! Fondée sur du vent, la théorie chimique se doublerait donc d’une escroquerie thérapeutique synonyme de pis-aller pour la santé mentale : shocking, isnt’it ? 
 
La peur de la pression
 
Que les traitements médicamenteux ne soient pas la panacée, voilà qui n’étonnera pas les psys bien informés. Dans une étude récente, des chercheurs espagnols ont montré que les soins psychologiques dispensés en première intention sont efficaces pour les personnes souffrant de dépression. Si l’on compare les antidépresseurs avec des séances de psychothérapie et/ou de régulation émotionnelle, ce sont les deuxièmes qui fonctionnent le mieux. Et si les ISRS semblent atténuer les symptômes chez les dépressifs sévères, ce serait dû au fait que cette catégorie de malades répond moins bien à l’effet placebo, et non à l’action bénéfique du médicament. En remontant aux traumas qui ont déprimé leurs patients et en leur apprenant à mieux gérer leurs émotions, les soignants du psychisme obtiennent en tout cas de meilleurs résultats que les prescripteurs de médocs. Ce qui serait encore plus profitable aux mélancoliques, comme on disait autrefois, c’est que les psychologues et les psychiatres s’initient au décodage biologique des maladies.  Ce que nous appelons pour notre part  « la nouvelle médecine du sens » a en effet mis le doigt  depuis longtemps sur la véritable  cause de la  dépression. Comme son nom l’indique clairement, cette affection frappe les individus qui ne supportent plus la pression et dont le cerveau inconscient choisit cette solution de survie pour échapper à un stress devenu insupportable.
 
Retrouver sa place
 
N’importe quel stress ? Non pas : les pionniers de la psychobiologie ont également découvert que la fuite dans la sinistrose est une façon d’échapper à des « conflits de territoire », c’est-à-dire à des situations conflictuelles de nature territoriale. Par exemple la faillite de son entreprise pour un patron, le harcèlement au travail pour un employé, l’infidélité du partenaire pour une personne amoureuse, etc…Tout dépend évidemment du ressenti individuel, mais « l’invariant biologique » de la dépression est l’incapacité de protéger un pré carré, l’inaptitude à se battre pour le conserver. C’est pourquoi, dans le 1er Tome de son ouvrage LE SENS DES MAUX,  où il aborde cette thématique,  notre auteur Bernard Tihon a résumé la dépression nerveuse comme étant « la peur d’aller au combat ». Cette peur est tellement paralysante que le dépressif est d’ailleurs en état de « pat hormonal », autrement dit en situation de blocage au niveau endocrinien. De manière merveilleusement logique, l’humeur noire va de pair avec une inhibition des hormones incitant à la lutte, comme la testostérone. La solution ? Sortir de cette sidération hormonale et trouver simultanément une issue pratique aux problématiques territoriales : renouer avec le succès pour un entrepreneur failli, changer de boulot pour une employée persécutée, récupérer  sa place dans le cœur de l’élue pour un amoureux déçu, etc…S’il fallait ne donner qu’un conseil ou qu’une consigne aux personnes affligées par  la « mal-a-dit » dépressive, ce serait certainement celle-là : (re)trouver la place qui a été perdue et surmonter la peur de ne pas y parvenir. Je vous accorde que c’est beaucoup moins facile à faire qu’à dire et qu’une pathologie pareille exige de se secouer vigoureusement pour espérer en guérir durablement. Mais maintenant que la théorie  fondant la médication classique s’est effondrée, c’est peut-être le bon moment d’explorer cette voie de guérison. 
                                            
 

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3 commentaires

  1. Et les mélancolies délirantes ? on leur demande gentiment de se secouer aussi ?
    Le suicidaire, on lui suggère d’aller faire un footing pour libérer les endorphines ?
    OK pour douter de la réponse médica-menteuse mais dans le dur de la psy, le « yaka » est illusoire et dangereux.

  2. « la recherche médicale a en revanche bien établi la relation entre les stress existentiels et le risque de dépression : plus une personne avait vécu d’événements stressants, plus elle était susceptible d’être déprimée »

    Il est comique de voir que la prétendue science moderne a besoin de recourir à la « recherche médicale » pour (re)découvrir une évidence, à savoir la relation entre stress existentiel et dépression. Car pour avoir tous vécu des instants ou des moments plus ou moins dépressifs, nous savons bien qu’ils coïncident toujours avec un problème existentiel.
    Quand le bon sens reprendra-t-il ses droits, non seulement chez l’homme ordinaire, mais chez celui qui se pique d’être « savant  » ?

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