Editorial n°132 : Expirer pour revivre

Pour la deuxième fois consécutivement, notre dossier du mois s’étale sur dix pages au lieu de six ou sept. Cette longueur exceptionnelle s’explique par le thème essentiel de l’enquête d’Oscar Hart : la respiration. Nous avons déjà abordé le sujet à plusieurs reprises, notamment en mai 2021, en publiant des extraits du livre
« L’incroyable pouvoir du souffle », mais nous y revenons et y reviendrons encore. Pourquoi ? Parce que la respiration est un outil de santé extraordinaire qui a le double avantage d’être totalement gratuit et extrêmement puissant. Ces deux qualités sont loin d’être antinomiques et sont même indissociables au regard de la naturopathie hippocratique traditionnelle, approche que nous avons toujours privilégiée en dehors du décodage psychobiologique. Selon l’hygiénisme naturopathique, les « facteurs naturels de santé » les plus efficaces sont en effet les moins onéreux ou ceux qui ne sont pas (encore) monétisés. Il s’agit de l’eau pure, de la lumière du soleil, de l’exercice physique, du repos et de l’air sain. Avec ces cinq atouts ne coûtant pas un sou pourvu d’avoir accès à une source, un être humain peut déjà repousser la maladie et allonger sa vie à condition de se nourrir sainement par ailleurs. Néanmoins, l’air sain ne servira à rien si l’art de bien respirer est négligé.

Contrairement à ce que beaucoup croient, l’art du souffle ne consiste pas à avaler goulûment de l’air et à se remplir les poumons avec un maximum d’oxygène. C’est même le contraire qu’il faudrait faire, il vaut mieux consommer ce gaz avec modération et on vous explique pourquoi dans le dossier. En très résumé, un bon fonctionnement du système respiratoire repose sur l’apport précieux de deux autres gaz pourtant décriés : l’oxyde nitrique (NO) et le dioxyde de carbone (CO2). Le premier est produit dans les fosses nasales de ceux qui ont la bonne habitude de respirer par le nez. Il a notamment montré dans des études qu’il faisait office de bouclier contre la grippe covid. Et le second préside paradoxalement à l’oxygénation cellulaire, elle-même fournissant le combustible à nos centrales énergétiques, les mitochondries. Or ce processus complexe est perturbé chez les hyperventilés chroniques que sont les gens stressés. Ils respirent trop vite, inspirent trop d’oxygène et se retrouvent ainsi… sous-oxygénés. Comme vous allez le lire, on peut remédier à cette carence par l’hypoventilation volontaire, c’est-à-dire des exercices d’apnée qui corrigent presque instantanément le déséquilibre gazeux et installent durablement le réflexe d’apaiser la respiration. Intuitivement, les inventeurs du yoga avaient déjà tout compris car cette discipline enseigne précisément à respirer lentement, tranquillement, à l’économie, et aussi à retenir son souffle après s’être vidé les poumons en expirant profondément. C’est toujours dans le fin fond des plus vieilles traditions que réside la sagesse authentique.

En Occident, nous avons cependant besoin de rationaliser les choses et de les valider scientifiquement. Et c’est tant mieux car les chercheurs qui s’aventurent dans ce domaine (re)découvrent combien l’hypoxie contrôlée peut aider à prévenir et à guérir les maladies. C’est le médecin ukrainien Konstantin Buteyko qui, dans les années 50, a fait l’expérience la plus éloquente : en apprenant aux patients asthmatiques à inhaler moins d’air, il les a tous tirés d’affaire ! Le traitement de l’asthme par sa méthode ou au moyen du samozdrav, un appareil d’entraînement respiratoire, est aujourd’hui monnaie courante en Russie. Dans ce pays pionnier du jeûne thérapeutique, on a vite compris que la restriction en oxygène pouvait aussi faire des merveilles. Comme je vous le raconte en page suivante (rubrique Santéchos), la science occidentale progresse également dans la compréhension de la respiration : une étude vient de montrer que le « souffle cyclique » (expirer plus longtemps qu’inspirer) réduisait drastiquement le stress et une autre que le temps de l’expiration permet au cerveau de se déconnecter légèrement, cette déconnexion mentale étant évidemment propice à la relaxation. Comme vous le lirez dans le dossier qui suit, il ne faut cependant pas en conclure que les techniques hyperventilatoires (méthode Wim Hof, respiration holotropique, oxygénation hyperbare, sport intensif…) sont à répudier. Non contente de modifier l’état de conscience et de favoriser ainsi un délestage émotionnel, l’hyperventilation provisoire facilite par la suite un fonctionnement respiratoire pacifié. Et respirer moins, c’est respirer mieux.

Yves Rasir

Couverture Revue N°132

Le numéro 132 (avril 2023)

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